Yaakov Avinou, figure emblématique de la Torah, traverse un épisode intense et mystérieux lorsqu’il lutte toute une nuit contre un « homme » — interprété par nos Sages comme un ange. Ce moment charnière dans la paracha Vayichla’h est bien plus qu’un événement historique ; il constitue une métaphore puissante de notre propre lutte intérieure, particulièrement pertinente dans le combat contre les dépendances. Cet article propose une lecture inspirée de cette épreuve, à travers trois angles : la persévérance dans l’obscurité, l’acceptation des combats nocturnes, et la transformation des blessures en bénédictions.
Yaakov qui lutte avec l’ange jusqu’à l’aube : une métaphore de la persévérance
Un combat qui dure toute la nuit
Dans Berechit 32:25, il est écrit :
« Yaakov resta seul. Et un homme lutta avec lui jusqu’à l’aube. »
Ce verset est le miroir d’un combat intérieur profond. Comme l’explique le Zohar, la nuit symbolise l’obscurité de l’épreuve, du doute, du Yetser Hara. Yaakov ne fuit pas. Il reste, il lutte.
Rabbi Nahman de Breslev nous enseigne;
« le monde entier est un pont très étroit, et l’essentiel est de ne pas avoir peur ».
Ce message résonne pour tous ceux qui luttent dans l’obscurité d’une dépendance : même dans le noir, nous ne sommes pas seuls, et surtout, nous ne sommes pas impuissants.
La persévérance comme chemin vers la lumière
La Torah ne dit pas que Yaakov a vaincu l’ange ; elle dit qu’il a tenu jusqu’à l’aube. C’est cela le message : l’essentiel n’est pas de ne jamais tomber, mais de se relever, encore et encore.
« Le juste tombe sept fois et se relève » (Proverbes 24:16).
Chaque nuit traversée est un pas vers l’aube. Le combat de Yaakov nous enseigne la valeur de la constance. C’est une lutte spirituelle, émotionnelle, psychologique — exactement comme celle décrite dans les programmes de sortie d’addiction.

Accepter qu’il y ait des « combats de nuit » avant la lumière
La nuit précède toujours le jour
Le Rav Avraham J. Twerski explique:
« la souffrance fait partie de la musique de la vie, même si elle sonne parfois comme une dissonance. »
Ce que nous percevons comme ténèbres est parfois le berceau de notre croissance.
Comme Viktor Frankl l’a démontré dans sa logothérapie:
« survivre, c’est trouver un sens à sa souffrance ».
Dans l’expérience de l’addiction, la nuit peut sembler éternelle, mais elle est souvent l’antichambre de la lumière, si elle est traversée avec une intention de transformation.
L’acceptation active dans la tradition juive
La thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT) — présentée dans les documents étudiés — enseigne l’importance d’accueillir la douleur au lieu de la fuir. C’est une idée profondément juive :
« Tout ce que fait le Miséricordieux, Il le fait pour le bien » (Brakhot 60b).
Accepter le combat, sans le fuir, sans s’enfuir dans des comportements compulsifs, c’est déjà un acte de grandeur.

Transformer ses blessures en bénédictions : le nom Israël
« Ton nom ne sera plus Yaakov, mais Israël »
Après cette lutte nocturne, l’ange donne un nouveau nom à Yaakov :
« Car tu as lutté avec des êtres divins et humains, et tu as triomphé » (Berechit 32:29).
Ce changement de nom est emblématique de la transformation spirituelle. Le nom « Israël » incarne la puissance du dépassement de soi. Nos blessures — lorsqu’elles sont confrontées avec courage — deviennent des titres de noblesse.
Le Rav Kook disait :
« le brisement du cœur est en réalité une ouverture à la lumière ».

Nos cicatrices ne sont pas des signes de défaite, mais les marques d’un combat qui nous élève.
Comme le dit le Talmud (Yoma 86a) :
« La téchouva transforme les fautes en mérites ».
Yaakov ressort de cette nuit avec une hanche blessée… et un nouveau nom. Il est devenu plus que ce qu’il était.
Conclusion
Le modèle de Yaakov Avinou est un guide lumineux pour celui qui traverse la nuit de l’épreuve. Son combat contre l’ange incarne la réalité de chaque homme en quête de sens, de pureté, de rédemption. Yaakov ne fuit pas. Il affronte, il tient bon. Et il en ressort transformé. Nous aussi, dans notre lutte contre l’addiction, pouvons suivre ses pas : accepter l’obscurité, persévérer dans la foi, et en sortir, un jour, appelés « Israël ».
Points clés à retenir :
- Yaakov a lutté dans la nuit, symbole des ténèbres intérieures que chacun affronte.
- Il n’a pas vaincu par la force, mais par la persévérance jusqu’à l’aube.
- L’acceptation du combat et la foi dans le processus sont des outils puissants de transformation.
- Son nom changé en Israël marque le pouvoir de transformer la douleur en élévation spirituelle.
- Ce récit inspire ceux qui luttent contre l’addiction à ne jamais se définir par leurs chutes, mais par leur capacité à se relever.