En ces temps où l’apparence et la maîtrise de soi semblent tout dominer, nombreux sont ceux qui cherchent dans la privation alimentaire une forme illusoire de contrôle et de pureté. Cet article explore, à travers la lumière de la Torah et des grands maîtres du judaïsme, comment sortir de ce piège et retrouver une véritable émouna (foi) qui libère de l’illusion du contrôle.
Le jeûne dévoyé et l’illusion de pureté
Le jeûne, dans sa vocation spirituelle authentique, est un puissant outil de rapprochement d’Hachem. Cependant, il arrive que certaines personnes l’utilisent non pour grandir spirituellement, mais pour chercher à compenser une perte de contrôle intérieure par la domination du corps. Le Talmud avertit déjà :
« Celui qui jeûne sans bonne intention est comparable à un forgeron qui souffle sur une braise éteinte. » (Taanit 11a)
Dans ce cadre, la privation devient un substitut maladif à une foi vivante. Plutôt qu’un chemin de purification, elle devient une quête anxieuse de perfection impossible. Ce n’est plus un service d’Hachem, mais une adoration du soi.
Rav Nahman : Le faux contrôle du Yetser
Rabbi Nahman de Breslev explique dans ses enseignements que le Yetser Hara (mauvais penchant) se déguise parfois en « piété » pour tromper l’homme :
« Le Yetser Hara ne cherche pas seulement à pousser au mal évident, il sait aussi entraîner l’homme dans des excès de bien. » (Likouté Moharan I, 72)
Ainsi, une privation alimentaire excessive, motivée non par amour pour Hachem mais par peur et par volonté de domination, peut devenir une arme du Yetser. Celui qui croit contrôler son corps sans abandon à D.ieu est en réalité asservi par une autre forme de désir : le désir de contrôle absolu.
Le Rambam souligne dans le Hilkhoth Déot
« ’un comportement extrême, même dans le bien, est destructeur ».
L’équilibre est la voie royale que la Torah enseigne.
La vraie émouna libère du contrôle
La vraie émouna enseigne que le monde n’est pas sous notre contrôle, mais entre les mains d’Hachem. Chercher à tout contrôler par nos propres forces est une forme subtile d’idolâtrie, où l’on s’adore soi-même au lieu de faire confiance au Créateur.
Comme il est écrit :
« Remets ta voie à Hachem, confie-toi en Lui, et Il agira. » (Tehilim 37:5)
Le judaïsme nous invite à cultiver une confiance active : faire ce qui est en notre pouvoir, mais en acceptant avec amour que tout résulte de la Volonté divine.
Rabbi Elazar dans le Talmud (Brakhot 60b) enseigne :
« Tout ce que fait Hachem est pour le bien. »
Ce n’est pas en nous maltraitant que nous atteindrons la sainteté, mais en vivant avec équilibre, amour et confiance.
Conclusion
La privation alimentaire utilisée pour chercher une illusoire pureté est un piège subtil tendu par le Yetser Hara. Le véritable chemin de la Torah invite à cultiver une foi vivante, une émouna qui libère du besoin maladif de contrôler sa vie par des moyens extrêmes. Seul l’abandon confiant entre les mains d’Hachem permet à l’âme de grandir librement. Que chacun trouve la force de se reconnecter à sa véritable mission, dans la joie, l’équilibre et la foi véritable.
Points clés à retenir :
- Le jeûne doit être motivé par la pureté d’intention, non par l’angoisse de contrôle.
- Le Yetser Hara peut utiliser même la privation pour piéger l’homme dans des excès malsains.
- La vraie force vient de l’abandon confiant entre les mains d’Hachem.
- Le judaïsme enseigne l’équilibre et non l’extrémisme dans la conduite spirituelle.
- La émouna authentique libère du besoin de tout maîtriser.